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Par 56 J-G-R-C 77 le 26 Octobre 2022 à 04:52
POEME D’hier
Henri de REGNIER
1864 – 1936
ELVIRE AUX
YEUX BAISSES
Quand le désir d’amour écarte ses genoux
Et que son bras plié jusqu’à sa bouche attire,
Tout à l’heure si clairs, si baissés et si doux,
On ne reconnaît plus les chastes yeux d’Elvire.
Eux qui s’attendrissaient aux roses du jardin
Et cherchaient une étoile à travers le feuillage,
Leur étrange regard est devenu soudain
Plus sombre que la nuit et plus noir que l’orage.
Toute Elvire à l’amour prend une autre beauté,
D’un souffle plus ardent s’enfle sa gorge dure,
Et son visage implore avec félicité
La caresse trop longue et le plaisir qui dure…
C’est en vain qu’à sa jambe elle a fait, sur sa peau,
Monter le bas soyeux et que la cuisse ajuste,
Et qu’elle a, ce matin avec un soin nouveau,
Paré son jeune corps délicat et robuste.
La robe, le jupon, le linge, le lacet,
Ni la boucle ne l’ont cependant garantie
Contre ce feu subtil, langoureux et secret
Qui la dresse lascive et l’étend alanguie.
Elvire ! Il a fallu, pleine de déraison,
Qu’au grand jour, a travers la ville qui vous guette,
Peureuse, vous vinssiez obéir aux frissons
Qui brûlait sourdement votre chair inquiète ;
Il a fallu laisser tomber de votre corps
Le corset au long busc et la souple chemise
Et montrer à des yeux, impurs en leurs transports,
Vos yeux d’esclave heureuse, accablée et soumise.
Car, sous le rude joug de l’amour souverain,
Vous n’êtes plus l’Elvire enfantine et pudique
Qui souriait naïve aux roses du jardin
Et qui cherchait l’étoile au ciel mélancolique.
Maintenant le désir écarte vos genoux,
Mais quand, grave, contente, apaisée et vêtue,
Vous ne serez plus la, vous rappellerez vous
Mystérieusement l’heure ou vous étiez nue ?
Non ! Dans votre jardin, doux a vos pas lassés,
Ou, parmi le feuillage, une étoile palpite,
De nouveau, vous serez Elvire aux yeux baissés
Que dispense l’oubli du soin d’être hypocrite.
Diffusion François Beauval
1ér trimestre 1975
J G R C
18-02-2012
23 commentaires -
Par 56 J-G-R-C 77 le 22 Octobre 2022 à 05:19
POEME D’hier
MOLINET Jean
+ 1507
CESTE FILLETTE
Ceste fillette à qui le tétin poinct,
Qui est tant gente et a les yeulx si vers,
Ne luy soyez ne rude ne pervers,
Mais la traictez doulcement et à poinct.
Despouillez vous et chemise et pour poinct
Et la gectez sur ung lict à l’envers,
Ceste fillette.
Après cela, si vous estes en poinct,
Accollez la de long et de travers,
Et si elle a les deux genoulx ouvers
Donnez dedans et ne l’espargnez poinct,
Ceste fillette.
Diffusion François Beauval
1ér trimestre 1975
J G R C
04-03-2012
19 commentaires -
Par 56 J-G-R-C 77 le 18 Octobre 2022 à 05:07
POEME D’hier
BAUDELAIRE Charles
1821 – 1867
DON JUAN
AUX ENFERS
Quand Don Juan descendit vers l’onde souterraineEt lorsqu’il eut donné son obole a Charon.
Un sombre mendiant, l’œil fier comme Antisthène,
D’un bras vengeur et fort saisit chaque aviron.
Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes,
Des femmes se tordaient sous le noir firmament,
Et, comme un grand troupeau de victimes offertes,
Derrière lui traînaient un long mugissement.
Sganarelle en riant lui réclamait ses gages,
Tandis que Don Luis avec un doigt tremblant
Montrait à tous les morts errant sur les rivages
Le fils audacieux qui railla son front blanc.
Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire,
Près de l’époux perfide et qui fut son amant,
Semblait lui réclamer un suprême sourire
Où brillait la douceur de son premier serment.
Tout droit dans son armure, un grand homme de pierre
Se tenait à la barre et coupait le flot noir;Mais le calme héros, courbé sur sa rapière,
Regardait le sillage et ne daignait rien voir.
diffusion François Beauval
1ér trimestre 1975
J-G-R-C26-02-2012
22 commentaires
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